02 mai 2014

Oui demandez le programme #be2505

J’ai lu comme beaucoup de monde l’article de Ploum sur l’inutilité des programmes.
Je n’ai pas été d’accord.
Bien sûr je comprends le découragement que l’on peut ressentir en observant la politique belge.
Compromis, lenteurs, immobilisme, mêmes têtes quoi qu’il arrive, démagogie, dualisation PS-MR alors qu'ils gouvernent ensemble… J’en passe.
Je le comprends d’autant mieux que ce ras-le-bol explique en partie ma présence sur les listes.
Mais je crois en l’importance primordiale des programmes, indépendamment de celui que je défends, dont je ne parlerai pas trop ici.

Cacophonie Politique © Serre

Whack a Duck

Tout d’abord coupons la tête au canard selon lequel les programmes ne sont jamais réalisés.

Les exemples sont légion mais quelques rappels pour la route :

Le droit de vote pour les femmes a un jour été dans un programme.
Le vote universel aussi.
De même que l’euthanasie, le mariage homosexuel, les congés payés… Légion je vous dis.

Plus proche de nous, la 6ème réforme de l'état était aussi dans des programmes.
Il est donc important de les lire, car la plupart des points qui composent un accord de gouvernement sont d’abord et avant tout des éléments dans un programme des membres de ce gouvernement.

Ensuite il n’est pas vrai non plus de dire qu’ils sont tellement dilués qu’on ne les reconnait pas.

Il suffit de prendre justement encore la réforme de l’état. Je vous jure qu’on la reconnait. Et on reconnaîtra bien aussi les 20 milliards qu'elle va coûter à la Région Wallonne.
Par contre ils font bien l’objet de pondérations arbitrages et modifications mais j’en reparlerai plus loin.

Warhol is a politician

Les programmes sont à mon sens la seule chose qui nous sépare de la politique au faciès.
Les partis l’ont compris qui débauchent à chaque élection du people par charrette entière.
Tel met en avant un présentateur de débats politiques, tel autre un Mr météo, tel autre encore un joueur de foot. Il est frais mon poisson.

On utilise les 15 minutes de gloire de l’un ou l’autre pour séduire l’électeur.
Ça c’est une dérive. On choisit des figures connues qui sont une alternative à l’adhésion à un programme.
Ce glissement met en évidence à quel point il est important de pouvoir recentrer un débat sur le fond plutôt que sur le people qui le porte.

On atteint le fond

Ou pas. Et c’est là le problème principal. A force de ne pas parler du fond ; d’éviter les explications, les prises de position courageuses, à force d’éviter la pédagogie, on s’enfonce dans le paraître.  Dans l’image. Le slogan.
Entre les uns qui brandissent l’épouvantail du bain de sang social dont ils sont responsables et les autres qui disent tous « avec nous ce serait mieux », avec les slogans faciles, la démagogie et le populisme béat, on a du mal à discerner le fond dans le discours. On creuse le lit de tous les populismes.

Dis-moi en quoi tu crois, je te dirai qui tu es

Parce que le programme est le lien avec les valeurs.
Ce qu’un programme explique, outre les mesures concrètes, c’est la place relative de chaque valeur dans les préoccupations d’un parti.
Pour écolo par exemple il est clair à les lire que les mesures environnementales sont plus importantes que les conséquences négatives de leurs choix pour les finances de l’état.
Si une mesure écolo plombe le budget, ce n’est pas très grave pour eux. C’est leur choix, ils y croient et le défendent. C’est le prix à payer. Leurs électeurs sont d'accord, ils le savent.

En lisant les programmes on sait aussi comment les partis envisagent d’arriver à plus de justice sociale.
Pour les partis de gauche, on y arrive par l’égalitarisme.
Lutte contre les élites, taxation des plus riches, limitation des redoublements, programmes scolaires facilités (…).
Pour les libéraux on y arrive par la liberté.
Suppression de réglementations, mise en autonomie, diminution des frais de fonctionnement de l’état (…)
Il faut le savoir.


Ils permettent surtout à l’électeur de voir quelle solution est apportée à un problème donné.
On parle beaucoup des enjeux au niveau des pensions. Quel parti accepte que l’on travaille plus longtemps ?
Quel parti le refuse ? Pour quelles raisons ?

Toutes ces choses sont dites dans les programmes et elles permettent in fine à l’électeur courageux qui les lit de décider qui il veut choisir pour le représenter dans les négociations et à la gestion de l'état.

Si on choisit une personne sur une liste, il est important de voir avec quel programme cette personne est d’accord et quelles mesures elle s’est engagée à défendre.

In ze mix

Alors bien sûr il y a aussi les points de programme que les partis abandonnent en cours de négociation.
Il était par exemple dans le programme de campagne de tous les partis francophones de ne pas scinder BHV sans contrepartie pour préserver les droits de 80.000 francophones qui y habitent depuis toujours.
Il était aussi dans le programme d’un parti de gauche de ne pas limiter le chômage dans le temps.
Les arbitrages, les négociations, les assemblages. Tu mets un peu d’eau dans ton rouge ?

Je crois que là on rentre dans une autre logique que l’explication d’un programme ; on touche à ce à quoi les partis sont prêts à renoncer pour arriver ou se maintenir au pouvoir.
Alors bien sûr cet éclairage n’est pas dans leur programme.

Mais c’est bien grâce aux programmes que l’on peut voir la différence entre les paroles et les actes.
C’est grâce à ces engagements solennels que les partis parjurent quelquefois que l’on peut savoir pour qui ne pas voter.
Si l’on n’avait pas ces programmes, si l'on ne gardait pas trace de ces promesses, on ne saurait pas évaluer le résultat. Aucun bilan des mensonges ne serait possible.




Dans une pièce politique et engagée que je suis allé voir récemment et que j’ai adoré, le héros hurlait « Réveillez-vous, rien ne va jamais changer »

Si on ne lit pas les programmes, si l’on se limite au vote par couleur, par tradition, à la belle gueule, au slogan, à l’agitation des peur, que ce soit celle du bain de sang ou de l’étranger, à l’ami, à celui qui nous a fourni un service ou un privilège, à celui qui a l’air sympa….

Si on consomme en électeur qui ne lit pas les programmes, Richard Moors aura certainement raison, rien ne va jamais changer.

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